Un peu d'histoire...
Les langues de France et la réforme de la Constitution
L’interprétation de l’article de la Constitution qui fait du français « la langue de la République » interdit de fait la possibilité d’un usage normal des autres langues du territoire de la dite république. Non seulement cette interprétation très restrictive viole l’égalité des citoyens mais viole aussi de nombreux textes et conventions internationaux que l’état a pourtant signés et ratifiés.
Remarquons qu’il s’agit bien d’une exception culturelle, puisque partout ailleurs, dès qu’il y a une minorité francophone, on juge que l’égalité entre citoyens consiste à accorder à la langue française minoritaire et régionale les mêmes droits qu’à la langue majoritaire et personne ne critique ni ne crie au scandale que 85% des Suisses par exemple doivent s’adapter à la langue française s’ils s’établissent en Suisse romande.
TEXTES INTERNATIONAUX
Déclaration universelle des droits de l’Homme, O N U, 10 décembre 1948 :
Article 2 : Chacun peut se prévaloir de tous les droits et toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion...
Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, Rome, 4 novembre 1950 :
Article 14 : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions...
Plus récemment, même si l’on juge que la Charte européenne des Droits Fondamentaux, Nice, décembre 2000, n’est pas un très bon texte, il convient de remarquer qu’elle contient deux articles qui se rapportent aux langues :
Article 21 : interdit la discrimination sous prétexte de la langue ou de l’appartenance à une minorité nationale.
Article 22: indique que l’Union devra respecter la diversité culturelle, religieuse et linguistique.
Rappelons que l’article 55 de la constitution française précise :
« Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. »
HISTORIQUE DE LA SITUATION ACTUELLE
Pendant la monarchie française jusqu’à Louis XIV
Dans l’ancienne monarchie, le roi est un peu le pater et magister de son peuple. Aussi Karl der Grosse (Charlemagne) fait prêcher en ancien allemand et en roman pour que le peuple comprenne l’évangile et les prêches de leurs prêtres.
Plus tard c’est en partie avec le souci que le peuple comprenne les actes judiciaires ou notariaux que les rois décident d’abandonner le latin au profit de la langue vulgaire (sans oublier la volonté de se détacher le plus possible de Rome).
C’est ainsi que dès 1490 le roi Charles VIII décide dans une Ordonnance sur le règlement de la justice au pays de Languedoc que :
« Les dits et dépositions des témoins qui seront ouïs et examinez d’oresnavant esdits cours et en tout païs de Languedoc soit par forme d’enqueste ou d’information et prinse sommaire seroit mis et redigez par escrit en langage françois et maternel tels que lesdits témoins puissent entendre leurs dépositions et on les puisse lire et recenser en tel langage et en la forme qu’ils auront dit et déposé ».
Il est bien évident qu’il s’agit alors d’occitan dans les terres de linguae occitanae et non du françois de Paris, totalement inconnu, à l’époque, de la majorité des habitants du Languedoc.
Cette politique est confirmée à plusieurs reprises par Luis XII en 1530 :
« Avons ordonné et ordonnons afin que les témoins entendent leurs dépositions et criminels leurs procès faits contre eux que doresnavant tous les procès criminels et lesdites enquestes en quelque matière que ce soit seront en vulgaire et langage du païs où seront faits lesdits procès criminels et enquestes autrement ne seront d’aucun effet ni valeur. »
François 1er confirme en 1535 :
« Ordonnons que et enjoignons auxdits notaires passer et escripvre tous et chacuns les contrats en langue vulgaire des contractants ».
Aussi, lorsqu’en 1539 l’Ordonnance de Villers-Cotterêts indique que « Doresnavant, tous arrests...soient prononcés...en langage maternel françois et non autrement » il est difficile de croire que François 1er change totalement de politique linguistique.
D’ailleurs Pierre Rebuffe, Premier Président au Parlement de Paris analyse dans ses Commentaria in constitutiones seu ordinationes regis, dont l’édition princeps date de 1560, l’Ordonnance de Villers- Cotterêts en ces termes :
« C’est pourquoi le Roi a décidé que ces actes seront rédigés en langage vulgaire et maternel...Car on dit communément maternelle de la langue du lieu où on est né, c’est pourquoi il appelle pour la France langage maternel celui qui est parlé dans le pays : mais il dit maternel françois et non pas simplement françois parce qu’il proclame ne pas vouloir obliger quiconque à se servir du langage françois (d’oil) mais de celui de son pays, selon les usages des différentes régions de France où ces actes sont faits. »
D’ailleurs le décret du 2 thermidor An II saura bien dire qu’il s’agissait de lutter à l’époque contre l’usage du latin.
Le cas catalan : Louis XIV et l’imposition du françois du Roi.
Lors de la conquête de l ‘Alsace dont la langue commune était l’allemand, la langue de Paris sera imposée par ordonnance pour tous les actes publics et officiels.Pour la Catalogne nord, c’est d’abord par la persuasion que le français essaye de prendre la place du catalan, puisque le traité de Péronne comme celui des Pyrénées ne modifie en rien l’application du droit et des constitutions catalanes. C’est ainsi que la création du Collège des quatre Nations, fondé en 1661, accueillera les fils des nobles catalans pour :
« Leur inspirer sensiblement la douceur de notre domination...et effacer dans leur cœur par la reconnaissance d’un traitement si favorable tous les sentiments d’une affection étrangère. »
Le seul article du traité des Pyrénées qui ne parle ni de frontières, ni de transfert de places fortes, ni du retour en grâce de Condé, l’article 56, confirme l’unité du droit catalan dans les deux Catalognes :
« Les successions testamentaires ou autres donations entre vifs ou autres des habitants de Catalogne et du Comté de Roussillon réciproquement des uns aux autres, leur demeureront également permises et inviolables, et en cas que sur le fait des dites successions et donations ou autres actes et contracts il arrivera entre eux des différens sur lesquelz ils fussent obligez de plaider et entrer en procez, la justice leur sera faite de chaque côté avec égalité et bonne foy quoiqu’ilz soient dans l’obéissance de l’autre party. »
Le traité des Pyrénées avait confirmé l’essentiel du droit catalan et comme le dit Michel Brunet dans son livre Le Roussillon une société contre l’État :
« Le Roussillon avait conservé aussi le privilège d’une sorte de bi- nationalité, ou pour s’exprimer plus précisément, les Catalans jouissaient de part et d’autre de la frontière d’une nationalité bi- valente grâce à laquelle ils n’étaient jamais considérés comme des étrangers sur le sol de la Catalogne ou du Roussillon. Le Conseil Général du département rappelait en l’An IX: Le traité des Pyrénées portait que les habitants du Roussillon jouissaient en Catalogne des mêmes avantages dont ils jouissaient avant et que les espagnols avaient le même droit en Roussillon ] ».
La francisation ainsi faite ne servant à rien le Roi, en violation des traités antérieurs imposera par la force le français en 1700 :
«...les procédures des justices subalternes des dits pays, les délibérations des magistrats des villes, les actes des nottaires et autres actes publics ont continué à y estre couchés en langue catalane par un usage que l’habitude seule a authorisé. Mais comme outre que cet usage répugne et est en quelque façon contraire à Nôtre authorité, à l’honneur de la Nation française ...Voulons et nous plaist que doresnavant et à commencer du premier may prochain toutes les procédures qui se feront dans les sièges et juridictions des dits pays de Roussillon, Conflans et Cerdagne, comme aussi les délibérations des magistrats des villes et communautés, les actes de nottaires et generallement tous autres actes publics qui se passeront en dits pays seront mis et couchés en langue française à peine de nullité. Défendons à tous avocats, Procureurs, Greffiers, Notaires et autres de ne plus servir pour cet effet de la langue catalane et aux Juges et Magistrats de ne souffrir ny de prononcer leurs jugements ou délibérations qu’en langue française ».
Malgré ces pressions et violations des traités, Antoine de Barillon constate en 1710 que :
«Le peuple du Roussillon se nomme et s’estime catalan et regarderait comme une dégradation et une injure le nom de français ou de catalan francisé. »
En 1787, voyageant dans la région Arthur Young écrit :
« Le Roussillon est en fait partie de l’Espagne : les habitants sont espagnols par la langue et les mœurs mais ils sont soumis à un gouvernement français. »
L’époque de la révolution
Lors de la convocation des États Généraux par le roi Louis XVI, les Catalans imaginent facilement un retour au système des Corts et le rétablissement des Constitucions de Catalunya. Ainsi le cahier de doléances de la ville de Perpignan demande :
« Que le traité de Pérone de 1641 soit à jamais la sauvegarde de nos privilèges, de nos loix, de nos constitutions particulières sanctionnées par le serment de Louis XIII et les Roys ses successeurs, confirmés par le traité des Pirénées et par plusieurs ordonnances de nos Roys. »
Et celui du Tiers État précise :
« Le tiers état demande que la jouissance des privilèges généraux de la province (il s’agit des lois fondamentales de la province, le droit catalan) rappelle sans cesse à son souvenir cette époque heureuse où elle fut réunie à l’empira français, laissant pourtant à ses députés le pouvoir de les modifier relativement au bien général en exceptant de cette modification et modération, le port d’armes, le droit de chasse, des milices et classes auxquelles il n’est pas sujet, privilèges dont il ne saurait consentir à être jamais dépouillé. »
Au début de l’époque révolutionnaire la constitution sera traduite dans les diverses langues de l’état, mais très vite l’imposition de la langue de la liberté sera la seule politique linguistique de la France.
Il est bon de rappeler que la prétendue tradition républicaine date en fait du décret du 2 thermidor An II, (20 juillet 1794). Or si beaucoup de nos adversaires (ceux qui appuient le génocide culturel et linguistique) aiment à le mentionner, si les tribunaux administratifs l’utilisent encore de nos jours, bien peu nombreux sont ceux qui osent en citer les termes car ils sont particulièrement inadmissibles pour ceux qui, dans le même temps, osent se parer de la toge des droits de l’Homme :
« Je dirai seulement que si les tyrans François 1er et Louis XIII ont cru nécessaire, pour détacher de la cour de Rome ceux qu’ils osaient appeler leurs sujets, d’interdire l’usage du latin dans les actes publics, et de consacrer cette défense par l’article III de l’ordonnance de 1539, par l’article XXXV de celle de 1563, et par l’article XXVII de celle de 1629 ; si le tyran Louis XIV a jugé utile, pour faire oublier la domination espagnole aux habitants du Roussillon, de rendre, en février 1700, un édit qui leur a défendu l’usage du catalan dans les procédures et dans les contrats notariés ; si le même despote a cru que, pour effacer dans l’esprit des Alsaciens et des Flamands les relations qui les avaient si longtemps liés à la maison d’Autriche, il était à propos de ne leur permettre de plaider ni en flamand, ni en allemand, nous pouvons bien, pour consolider la liberté du peuple, employer de semblables mesures, et à notre tour nous devons faire servir à l’affermissement de la République ce qui autrefois n’a fait que river les fers de nos ancêtres.
Votre comité de législation me charge, en conséquence, de vous présenter le projet de décret suivant :
[MERLIN (de Douai)] propose et la Convention nationale décrète ce qui suit :
« Art. I. – A compter du jour de la publication de la présente loi, nul acte public ne pourra, dans quelque partie que ce soit du territoire de la République, être écrit qu’en langue française.
« Art. II. – Après le mois qui suivra la publication de la présente loi, il ne pourra être enregistré aucun acte, même sous seing privé, s’il n’est écrit en langue française.
« Art. III. – Tout fonctionnaire ou officier public, tout agent du gouvernement qui, à dater du jour de la publication de la présente loi, dressera, écrira ou souscrira dans l’exercice de ses fonctions des procès-verbaux, jugements, contrats ou autres actes généralement quelconques conçus en idiômes (sic) ou langues autres que la française, sera traduit devant le tribunal de police correctionnelle de sa résidence, condamné à six mois d’emprisonnement, et destitué.
« Art. IV. – La même peine aura lieu contre tout receveur du droit d’enregistrement qui, après le mois de la publication de la présente loi, enregistrera des actes, même sous seing privé, écrits en idiômes (re-sic) ou langues autres que la française. »
À cette époque de liberté on n’hésite pas à envisager les grands moyens. Ainsi le maire montagnard de Strasbourg déclare le 6 mai 1794 devant la Société des jacobins :
« Un autre moyen très efficace de régénérer, en assez peu de temps, l’esprit public du Bas Rhin, serait d’y fixer un grand nombre de français de l’intérieur...que les familles du pays, qui ont droit aux récompenses nationales, les obtiennent dans l’intérieur, la rive gauche du Rhin sera alors bordée de républicains qui, par leur éducation, leurs habitudes, leur langage feront un contraste frappant avec ceux de la rive opposée : les idées s’épureront, la constitution même changera par le croisement des races, la barbarie germanique disparaîtra et la république ne sera pas plus française au centre qu’à l’extrême frontière. »
Ainsi à la personnalité « divine » du roi qui fait l’unité du royaume, on a substitué le mythe de la nation incréée et indivisible dont Napoléon Bonaparte consolida l’inspiration régalienne et la centralisation administrative.
« La francisation républicaine, qui fut essentiellement l’œuvre de l’école, fut une « nationalisation », une intériorisation de l’État- nation et de son « histoire » francophone, parisienne, monocentrée, ancrée dans l’immémorial gaulois. » Suzanne Citron, Le mythe national.
Cette croyance en la supériorité ontologique de la langue française est critiquée par Marx dans une lettre à Engels, rapportant une séance de conseil de l’Internationale, d’une façon sarcastique :
«Les représentants de la jeune fraction ont déclaré que les nationalités et les nations elles-mêmes étaient des préjugés vétustes...Les Anglais se sont bien amusés lorsque j’ai commencé mon discours en disant que notre camarade Lafargue, après avoir allègrement supprimé les nationalités, avait cru bon de s’adresser à nous « en français »...Je suggérai également qu’en niant les nationalités il avait l’air de comprendre, bien inconsciemment, leur absorption dans la nation modèle que constitue le France. »
Pour imposer l’unité de langue on pouvait tout envisager à l’époque révolutionnaire, même la déportation massive de populations entières mais nous aurions pu penser que la France du XXIème siècle pouvait avoir une autre politique. Pour le moment rien ne bouge et c’est même à un durcissement d’une politique nationaliste francophone à laquelle nous assistons.
Malgré ces nombreux textes internationaux officiellement respectés par la France, le Conseil Constitutionnel et le Conseil d’État,* par leur interprétation restrictive, interdisent toute chance de développement et même de survie à nos langues dites régionales.
Alors que tout état voulant intégrer l’Union Européenne doit reconnaître les droits de ses minorités (ce fut le cas de la Slovaquie qui modifia sa constitution en reconnaissant les droits des Slovaques de langue hongroise pour pouvoir prétendre à une intégration future) l’article 2 de la Constitution en « empêchant » toute reconnaissance de la diversité linguistique et culturelle, met la France en porte-à- faux avec la communauté internationale. Cette politique a été très fermement mise en cause par les commissaires du Comité des Droits Économiques, Sociaux et Culturels des Nations Unies, au cours de la 27ème session à Genève.
Ils ont également accusé certains tribunaux français, et notamment le Conseil d’État, de refuser de reconnaître la primauté du droit international et de ne pas appliquer directement les conventions internationales.Ils ont mis la France en demeure de ratifier les conventions internationales, dont la Charte Européenne des Langues Régionales ou minoritaires. ( en particulier les §§ 15 et 25).
Le Comité a en outre, demandé à la France de faire une large information sur ses conclusions finales à tous les niveaux de la société – ce qu’on attend toujours.
Devant cette situation, afin que la seule solution pour les citoyens français qui défendent les langues ne soit pas le recours direct aux instances internationales (l’interprétation du Conseil Constitutionnel rend inutile les recours aux instances « nationales ») il est urgent que la Constitution de la France intègre le droit international. (Surtout lorsqu’on prétend donner des leçons au monde entier !)
Aussi Défense et Promotion des Langues de France et tous ceux qui n’acceptent pas la mort violente de leurs langues attirent l’attention de tous les élus sur l’urgence de mettre la République en accord avec les droits partout reconnus dans le monde démocratique. Il semble que seule l’intégration des langues régionales dans le texte constitutionnel soir de nature à assurer leur survie. (La Constitution italienne, d’une république une et indivisible ne mentionne que ses langues minoritaires !).
Pour conclure cette petite présentation quelques citations confirmant que certains hommes politiques, pourtant soucieux de défendre l’unité nationale, n’ont pas hésité à proposer un changement de la vision centraliste de l’état. Ce fut le cas du général de Gaulle qui prit, à plusieurs reprises, une position plus ouverte :
«L’effort multiséculaire de centralisation, qui fut longtemps nécessaire pour réaliser et maintenir son unité malgré les divergences des provinces qui lui étaient successivement rattachées, ne s’impose plus désormais » allocution à Lyon du 24 mars 1968.
« ...la région apparaît aujourd’hui comme l’élément local essentiel. En effet, son caractère ethnique* et géographique, sa dimension, ses ressources, lui permettent d’avoir une vie propre..." conférence de presse tenue au Palais de l’Élysée le 9 septembre 1968.
Certaines autres déclarations n’étaient peut-être pas dénuées d’arrière-pensées avant les élections, mais elles ont le mérite d’exister. Ainsi datant déjà de plus de 25 ans : Jacques Chirac à Défense et Promotion des Langues de France (18 avril 1981) :
« Les cultures régionales sont des ponts, des médiateurs vers des cultures européennes plus vastes. Par elles, la France retrouve la diversité de ses propres sources qu’un centralisme excessif et la crainte presque obsessionnelle d’un éclatement de l’unité nationale avaient essayé de tarir...Une loi cadre attribuerait à la Région la haute autorité sur les problèmes de culture régionale, de formation des enseignants. »
Et François Mitterrand, le 28 avril de la même année :
« Je tiens à vous signaler que mes amis parlementaires ont déposé lors de la dernière session de l’Assemblée nationale, une proposition de loi relative à la place des langues et Cultures des peuples de France dans l’enseignement, dans l’Education permanente, dans les activités culturelles, de jeunesse et de loisirs, dans les émissions de radio et de la télévision et dans la vie publique.
Si je suis élu Président de la République, je demanderai au prochain gouvernement de soumettre cette proposition au parlement ».
Et la déclaration d’un ministre français de la culture à l’Île Maurice sur « la pluralité des langues dans la francophonie » vaut son pesant d’or :
« Il ne saurait y avoir de véritable liberté sans respect des identités culturelles et linguistiques, respect existant, lui, au sein de la francophonie ».
Le projet doit mûrir très lentement sans doute puisqu’à ce jour rien n’a changé. Mais comment appliquer ces idées sans inclure les langues « régionales » dans le corps de la Constitution ?
* Beaucoup insistent sur le fait que la France n’est pas une nation « ethnique » sans savoir, semble-t-il ce que le mot ethnie signifie en français. La définition de ce mot dans le Robert y est la suivante : «Ensemble d’individus que rapprochent un certain nombre de caractères de civilisation, notamment la communauté de langue et de culture (alors que la race dépend de caractères anatomiques) ».
Il est bien clair que l’imposition d’une langue et d’une culture uniques est, de fait, la volonté de créer une nation ethnique, même si, par ignorance du vocabulaire français, on prétend le contraire. La république du XXIème siècle semble rester fidèle à l’esprit de Jules Ferry :
« Si la France veut rester un grand pays, elle doit porter partout où elle le peut, sa langue, ses mœurs, son drapeau, ses armes et son génie ».
Bien d’autres déclarations pourraient être citées :
Jean Jaurès, en1881 : « Nous pouvons dire à ces peuples sans les tromper que là où la France est établie, on l’aime ; que là où elle ne fait que passer, on la regrette; que partout où sa lumière resplendit, elle est bienfaisante ; que là où elle ne brille pas, elle a laissé derrière elle un long et doux crépuscule, où les regards et les cœurs restent attachés »
Et pourtant presque tous continuent à présenter la collectivité nationale comme une adhésion à des valeurs communes, un choix conscient et décidé, une volonté de vivre ensemble etc...loin officiellement d’une nation ethnique...où une langue unique est imposée en étouffant toutes les autres.
Ce sont les Corts (parlement de Catalogne) qui en 1413 ont demandé que les Constitucions i Usatges, textes juridiques, « sien tornats de llati en romanç ».
Dernière minute : réforme de la constitution 2008
Le vote de l’article 75.1 de la constitution « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » n’a donné aucun droit aux langues de l’état et le français reste et restera la seule langue ayant valeur légale sur l’ensemble du territoire. (Décision du Conseil Constitutionnel).
Comme les valeurs de la nation française sont universelles on peut malgré tout s’interroger sur les réactions qui se produiraient, au pays des Droits de l’Homme si pour imposer enfin l’égalité entre tous les citoyens canadiens l’état imposait l’anglais comme langue unique.... Est-il possible d’avoir deux interprétations opposées de l’égalité sans se dire que l’une d’entre elles est sans doute à revoir ?
Joan Dorandeu, ancien président du Bureau européen pour les langues moins répandues, a participé à ce titre à l’élaboration de la Charte du Conseil de l’Europe.
L'emploi du catalan dans nos mairies